samedi 20 avril 2013

Hessel et Cahuzac : de l'utilité de l'indignation.


On  voudrait que le scandale Cahuzac soulève  la question du patrimoine des hommes politiques, ou de celle de la fraude fiscale, ou encore du mensonge en politique. Il n’en est rien. On sait à peu près à quoi s’en tenir sur ces sujets-là depuis bien longtemps.
Seule la proximité de cet évènement avec la disparition de Stéphane Hessel est de nature à retenir notre attention. En effet, l'homme  qui célébrait l’indignation, récemment disparu, s’est curieusement  rapproché de celui qui la suscite par une sorte d'ironie du hasard.
Depuis  les aveux de l’ancien chirurgien, c'est à un florilège de propos indignés que l'on assiste. Même les mesures prises par le President de la République sont dictées par ce sentiment. Comme s’il s’agissait de mettre en œuvre les théories du vieil homme ! Elles  se trouvent de la sorte spectaculairement soumises à l’épreuve de la réalité.
L’indignation, puisqu’on en fait un usage immodéré depuis quelques semaines, sera-t-elle le principe qui permettra de surmonter la crise morale et politique ? C’est bien là la seule vraie question  intéressante que soulève  l’affaire Cahuzac.
Ainsi, les proches de l’ancien ministre du budget, tout comme ses adversaires politiques, font assaut de propos vertueux. On conspue le menteur. On le méprise. On dénigre le fraudeur. Le plus modéré s'emploie, la mine outrée, à rabaisser plus bas que terre le ministre des impôts délinquant fiscal. Chacun prétend fonder son dégoût sur l'ignorance des faits en cause. L'homme avait l'air si sincère ! Aurait-il fallu être bien vicieux pour s'imaginer un comportement si vicieux. Et puis si le chef de l'Etat lui-même, fort de ses renseignements généraux, de ses services de police, de ses administrations fiscales et de ses douanes, et surtout si soucieux de sélectionner les personnes le plus intègres pour occuper de hautes fonctions, n'avait rien constaté,  comment nous, simples hommes politiques, si honnêtes, si sincères, si transparents,  aurions nous pu soupçonner quoique se soit ?
Non vraiment, c'est un scandale, indignons-nous !
Plus nous nous indignerons, plus nous démontrerons à quel point ce Cahuzac n'est pas des nôtres. François Hollande l'a bien compris.Jean-Marc Ayraut également. Toute leur attitude tend à montrer, par l'usage de l'indignation, à quel point Cahuzac ne fait pas partie des hommes. Forcément, puisqu'il n'est plus socialiste. Son exercice de contrition, si catholique dans son esprit, ne peut inspirer que du mépris. Pathétique, assène le Premier ministre. Pathétique en effet, mais peut-être pas pour la raison qu'invoque le chef du gouvernement.
Que nous apprend l'indignation du personnel politique à l'occasion de l'affaire Cahuzac ?
Que l'amitié n'est rien, que la proximité politique n'est rien, que l'intégrité n'est rien, que la dignité n'est rien. Survivre est tout. Mais On le savait déjà. Donc, l'indignation ne sert à rien sinon servir ceux qui seront les Cahuzac de demain en innocentant les hypocrites d'aujourd'hui.
Quant aux mesures prises par les pouvoirs publics, il faudrait se dépêcher d'en rire avant de devoir en pleurer. La pantalonnade des déclarations de patrimoine des ministres suffit à Montrer même aux esprits indulgents à quel point ces décisions si révolutionnaires auront pour conséquence de conserver l'état actuel des choses.
Et bien, au risque d’apporter la contradiction aux admirateurs de Stéphane Hessel, la démonstration est désormais faite : l’indignation ne sert à rien.
Elle ne fait qu’attiser le malaise et rendre bien solitaire l’adjectif qui convient à l’atmosphère actuelle : délétère.







3 commentaires:

  1. Vous venez de tuer cet admirable Stéphane pour la seconde fois : je ne vous félicite pas pour cette vilenie.

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  2. Pardon m'sieur.

    J'l'ai pas fait exprès.

    C'est les circonstances qui m'y ont poussé.

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  3. Voilà qui méritait d'être écrit, en tout cas. Ce brave Cahuzac
    aura au moins servi à quelque chose...quel dommage qu'on n'en parle presque plus!
    Amitiés.

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