mercredi 18 février 2015

11 janvier 2015 : une révolution copernicienne.









Il est de l'essence même du réactionnariat d'être indépendant d'esprit, sceptique, voire fondamentalement pessimiste devant les mouvements de foule. Face aux évènements de début d'année, avec le recul de quelques semaines, j'ai été à la fois consterné, faché, rétif, un peu déprimé, peu Charlie, et pas du tout étonné. Toutefois, à la différence de bien des "réacs", je les considère comme un point d'inflexion fondamental de notre histoire contemporaine. Singulièrement, la "marche républicaine" du 11 janvier m'apparait comme une sorte de révolution copernicienne qui n'ose pas dire son nom et dont les conséquences ne sont encore mesurées par personne.

Je dois être clair : il n'entre pas de naïveté, ni d'optimisme benoît dans mon propos. Je sais bien que le mouvement qui s'est levé ce dimanche-là est de signification fort diverse, et est retombé aussitôt. Je vois bien que les pouvoirs publics l'ont détourné à leur profit, ce qui est de bonne guerre politique d'ailleurs, mais surtout ont osés accréditer l'idée que les premières victimes de ces attentats étaient les musulmans, et qu'il ne fallait pas faire d'amalgame, etc, etc, ...J'ai parfaitement conscience que sur le fond la politique menée jusqu'à présent sera maintenue, voire amplifiée, avec les brillants résultats que l'on a sous les yeux. Je constate également que l'opposition "républicaine", Juppé en tête ( Sarkozy vaut-il mieux ?) n'a rien de mieux à proposer que de continuer à baisser la garde et la tête devant ceux qu'il faut bien se résoudre à appeller nos ennemis...Bref, il n'entre nullement dans mon propos de bêler avec les autres.

Pourtant, rien ne sera comme avant.Voici pourquoi.

Le 3 octobre 1980, une bombe éclate devant la synagogue de la rue Copernic dans le seizième arrondissement de la capitale. Quatre morts, quarante-six blessés. C'est le premier attentat antisémite en France depuis la seconde guerre mondiale. Immédiatement, les bonnes âmes crient haro sur l'extrême droite ( un groupuscule  néo-nazi sera d'ailleurs dissout à cette occasion, ce dont tout le monde se fout éperdument et à juste titre), au retour de la bête immonde, et tutti quanti. Les cours sont suspendus dans le lycée où je tentais de me préparer au bac, au profit de ridicules débats sur le fascisme. On est au bord de la crise morale. On y est. Hitler et Pétain ressuscités des morts pour terroriser les gauchistes et les juifs. Une armée de fafs dûment casqués aller marcher sur Paris et submerger le pouvoir bourgeois incarné par Giscard,  Barre leur opposant Mitran. Faites sonner le tocsin !



Plusieurs mois plus tard, on appris que les auteurs de cet acte terroriste fondateur (quoiqu'oublié aujourd'hui) n'étaient autres que des palestiniens bien copains avec nos indignés d'octobre 1980. L'émotion s'était évanouie et l'erreur oubliée. On était passé à autre chose.

Mais la  réaction face au terrorisme  est restée sur cette matrice :

-l’extrême droite en est l'inspiratrice,

-l'extrême-gauche, les arabes, les islamistes, les immigrés, ne sauraient en être les auteurs.

Et ce, même contre toute évidence, au prix souvent de circonvolutions  qui font honneur aux facultés d'imagination de l'humanité.

Je ne ferai pas l'historique de cette funeste propension à l'erreur, cela nous ferait bien rire, certes,  mais ce serait trop long. Ses derniers avatars datent d'avant les fêtes : aux marchés de Noël de Nantes, au commissariat de Joué-les-Tours. Ceux qui ont commis ses actes, comme Merah, ne seraient que des "loups solitaires", des "déséquilibrés", mais certainement pas des terroristes islamiques issus de l'immigration. Et d'ailleurs, ne réagissent-ils pas ainsi à cause de Le Pen, de Zemmour, de Finky, etc ?...

Pourtant, devant l'évidence des évènements survenus début janvier, il ne sera plus possible de s'en tenir à de telles fadaises sans sombrer dans le grotesque. A l'évidence, les Kouachi et Coulibaly sont des français musulmans issus de l'immigration , sans liens avec l’extrême-droite, parfaitement sains d'esprit, organisés, coordonnés entre-eux, animés d'une haine inextinguible contre la France, les saintes valeurs républicaines, et les juifs. Scandale de la vérité !

Même à l'occasion de la profanation du cimetière juif de Sarre-Union en Alsace ces derniers jours, il ne s'est pas élevé une voix pour accuser l'extrême-droite antisémite ! les regards ( à tort ou à raison, ce n'est pas la question ) ce sont tournées vers les islamistes. Il faut mesurer la véritable révolution politique et morale que cela constitue.

Quoiqu'on en dise ou en pense, les français on maintenant compris que l'ennemi est là, parmi nous, tel qu'il est, qui il est, et qu'il sait viser juste.

Seuls les politiques font semblant de de l'ignorer. Pour combien de temps ?

L'onde de choc du 11 janvier n'a pas fini de se propager en souterrain, Dieu seul sait ce qu'elle provoquera. Pour ma part, je souris jaune de l'ironie qui a fait aux terroristes de l'époque choisir de poser leur bombe devant une synagogue de la rue Copernic. La  révolution copernicienne française a attendu 35 ans . Elle éclate maintenant.